Les images échographiques montrent une volumineuse cavité mesurant 27x25 mm, péri-aortique, du côté du sinus de Valsalva antéro-droit, qui se remplit en systole à partir du ventricule gauche mieux visible en ETO et indiquée par l’astérisque rouge (Vidéo 1 et 3 et Figures 1 et 2) évoquant un abcès de l’anneau aortique rompu et détergé. On note également la présence d’une désinsertion partielle de la bioprothèse aortique en regard de l’abcès occasionnant une fuite para-prothétique importante (Vidéos 2 et 3). En ETO, la désinsertion s’étend sur un tiers de la circonférence de l’anneau, la déhiscence est indiquée par la flèche blanche (Figure 2). Par ailleurs, la Bioprothèse aortique est le siège d’une végétation mobile sur le versant ventriculaire et qui prolabe dans la chambre de chasse et responsable d’une sténose trans-prothétique significative (Figure 3) avec une Vmax=4,69m/s et un gradient moyen VG-Ao=55mmHg.
Ces images échographiques étaient associées à un syndrome infectieux et des hémocultures positives à Streptocoque, permettant de retenir le diagnostic d’endocardite infectieuse sur bioprothèse aortique compliquée d’un abcès de l’anneau aortique et d’une désinsertion de la bioprothèse aortique. Le patient a bénéficié d’une prise en charge médico-chirurgicale urgente.
Les bioprothèses sont de plus en plus utilisées pour le remplacement valvulaire avec un controverse sur le rapport bénéfice/risque par rapport aux valves mécaniques chez les patients jeunes. Beaucoup de théories expliquent l’incidence élevée de l’endocardite infectieuse de la Bioprothèse : la dégénérescence accélérée des valves bioprothétiques entraîne des turbulences hémodynamiques et des lésions endothéliales, ce qui facilite l'ensemencement bactérien. [1] Le site privilégié d'invasion bactérienne semble être la couche de fibrine qui se forme à la surface de la cusp après la dénudation de l'endothélium de la valve.
Dans le cas des prothèses mécaniques, la déhiscence de la valve et la fuite para-prothétique entraînent une régurgitation. En revanche, les déchirures, les perforations ou la destruction généralisée des cusps constituent le mécanisme habituel de l'insuffisance avec les bioprothèses .[1]
Occasionnellement, des végétations sténosantes et/ou des thrombi peuvent conduire à une sténose avec l'un ou l'autre type de prothèse. Cette complication semble plus fréquente en position mitrale qu'en position aortique. Ce qui est particulièrement inhabituel dans notre cas, c'est l'apparition simultanée d'une déhiscence de la bioprothèse et des signes hémodynamiques de sténose.
[1] Anantha-Narayanan M, Reddy YNV, Sundaram V, et al.
Endocarditis risk with bioprosthetic and mechanical
valves: systematic review and meta-analysis.
Heart;9:heartjnl-2020-316718